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 Après la panse vient la danse [Mael]

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Jörkiel JördenJörkiel Jörden

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MessageSujet: Après la panse vient la danse [Mael]   Après la panse vient la danse [Mael] EmptyMer 25 Fév 2015 - 21:09

    Il y avait de la musique dans l'air. Quelque chose de joyeux, de clair, de bondissant, d'indifférent aux états-d'âmes d'Olaf ou Olrik. Par la magie des convenances, le pseudo-drame du Tournois semblait effacé, inexistant. La salle de Bal resplendissait, comme elle devait le faire, et les nobles qui la remplissaient avaient revêtus leurs plus beaux atours, habillant de ce fait la pièce de couleurs chamarrées aux reflets irisés. Les dames s'étaient faites belles, les messieurs avaient revêtu les couleurs de leurs maisons, et tout ce petit monde, du jeune adolescent timide aux douairières réprobatrices, discutait, dansait, riait et médisait avec un naturel à peine forcé. Alors certes, certaines dames étaient toujours un peu pâles et les murmures des petits groupes avaient au moins autant les prédictions de l'illuminé que l'amour pour thème mais cela n'avait pas d'importance. En ce soir de fête pour les jumeaux royaux, le monde de la noblesse faisait ce qu'il faisait de mieux, mentant au monde et gardant vives et fières les sacro-saintes apparences.

    Debout dans l'embrasure d'une fenêtre, le tissu léger de sa tenue de fête frôlant l'épais dais de velours qui protégeait les invités des courants d'air, Jörkiel regardait la scène avec un intérêt non feint et un sourire à la fois triste et ironique. Il était resté autant que possible en arrière plan durant toutes les festivités, apparaissant lorsque les circonstances l’exigeaient, soutenant son Roi comme tout bon Jörden se devait de le faire, quand bien même son discours d'ouverture avait montré de réelles faiblesses politiques et oratoires, malgré son idée farfelue de faire un feu de bois en été et en plein après-midi, l'entourant de superstition, enlevant tout son sens à un vrai feu de joie. Le Feu était un élément essentiel au peuple du Nord. C'était lui qui décidait de la vie et de la mort. Il était le symbole du retour de la lumière lors de la nuit la plus sombre de l'année, il était le vaisseau emportant les morts dans l'au-delà. Il était la première et la dernière chose qui animait chaque être. Le feu était ce qui brûlait dans les veines des hommes. Le vecteur de chaque émotion, gaie ou triste. Mais comme toutes les passions, il aveuglait plus qu'il n'éclairait et, en aucun cas, il n'avait le pouvoir de voir l'avenir.

    Le veuf n'avait rien dit, toutefois. Il était en terrain peu connu et n'avait pas pour habitude de critiquer les coutumes de ses hôtes autrement qu'en pensée. Il était venu voir le spectacle, admirant les jeunes et les galets plein d'espoirs qu'ils plaçaient dans l'âtre. Parmi eux s'était avancée la jeune Heyerdhal, Maelennig dont il ne désespérait pas de faire sa fiancée un jour. Il l'avait regardée être le centre de l'attention des jeunes héritiers du pays, il l'avait regardée danser avec ses cousins, parler avec ses nièces et neveux, rester sagement au milieu de sa famille ou de son groupe de femmes de compagnie. Il n'avait rien dit. Il n'était pas allé la voir. Supposant – avec raison, sans doute – qu'elle avait assez à faire avec ses nouveaux soupirants pour ne pas accueillir avec plaisir les attentions d'un ancien. Il avait, quant à lui, déjà placé ses pions et suffisamment confiance en sa proposition et sa stratégie pour ne pas vraiment s'inquiéter. Mais ça, c'était avant le Tournois.

    Au début, les festivités sportives s'étaient avérées totalement banales et dépourvues d'intérêt. N'aimant pas les sports et les activités d'extérieur, le Seigneur des Terres du Nord aurait nettement préféré pouvoir hanter la bibliothèque du château et faisait de son mieux pour faire bonne figure tandis qu'il regardait une jeune femme, fille de Seigneur qui plus était, attaquer de sang froid un jeune mage qui devait à peine avoir son âge et aurait mieux fait de continuer ses études plutôt que de se livrer à ces jeux stupides. La dangerosité et le gâchis de ce genre de spectacle rendait le calme nordique assez hermétique à ce genre de divertissement et son air déjà froid d'ordinaire ne s'était que peu animé. Jusqu'au moment fatidique où un homme étrange se mit à crier dans la foule, provoquant une panique dangereuse. Ce n'étaient pas tellement les paroles de l'illuminé qui avaient inquiété le jeune homme mais bien les mouvements d'une masse humaine affolée et incapable de prendre soin de son prochain. Son cœur s'était accéléré, son visage avait blanchit, tandis qu'il cherchait des yeux celle qu'il avait choisi pour régner à ses côtés. Si elle devait périr alors qu'il venait de faire une proposition informelle, ça allait lui retomber dessus. Les Avalachs ne laisseraient pas passer une telle occasion de se venger et tous les rieurs et les superstitieux recommenceraient à faire devant lui le signe destiné à éloigner les malédictions. Il ne la vit pas cependant, un mouvement de population l'obligeant à se retirer assez vite et sans incident sur sa personne.

    Les heures suivantes l'avaient toutefois trouvé nerveux, d'une nervosité qu'il ne se connaissait pas. Il n'était pas vraiment inquiet pour la jeune femme, mais les conséquences d'une blessure ou d'une mort passaient sans cesse dans son esprit. Il fallait qu'elle aille bien. Pour le bien du Nord. Pour son bien propre à lui. Et parce qu'il s'en serait voulu d'avoir laissé une telle occasion de gagner des points sur ses adversaires. Il su toutefois garder l'esprit clair. Il ne posa aucune question à personne, il n'envoya pas un page prendre de ses nouvelles, il resta encore une fois dans l'ombre, cachant ses craintes et ses fantaisies, se contentant d'apporter un soin particulier à sa tenue, comme si le fait d'être parfaitement apprêté allait déjouer le sort. Il avait alors mit de côté la tenue de deuil qu'il avait prévue, enfilant une tunique claire aux liserés et broderies dorés, ajustée au niveau du torse, s'évasant à partir de la taille et des coudes. En bas, un pantalon brun, simple et léger, dont la coupe précise et sans fioriture était encore une preuve des dons des artisans du Nord. Il avait détaché ses cheveux blonds clairs qu'il avait simplement ceints d'un cercle de métal argenté, incrusté de nombreux éclats de pierre brillants accrochant la lumière des chandelles pour la disperser en reflets irisés autour de lui. Aux pieds, de simple bottes de cuir clair finissaient sa tenue de gala et, pour représenter le nord, une bourse en peau de lapin ornait sa ceinture. Dedans se trouvait le cadeau qu'il devait donner à sa future peut-être promise, si elle allait bien.

    Les musiciens avaient lancé un autre morceau, au moins aussi entraînant que le premier lorsqu'il l'aperçu enfin. Elle discutait tranquillement avec des femmes de son clan. Autour d'elle, deux ou trois prétendants tournaient, indécis, se demandant visiblement s'ils pouvaient l'interrompre, l'ennuyer, voire l'inviter à danser. Personne cependant n'avait encore tenter d'enlever la sœur de la Reine. C'était son moment. Jörkiel n'hésita pas. Quittant son poste d'observation, il traversa tranquillement la salle, du pas de celui qui sait ce qu'il fait, où il va, et qui n'acceptera aucun contre-temps. Il s'approcha du groupe, tranquillement, sûr de lui mais sans non plus s'imposer, attendit un léger ralentissement dans la conversation et s'inclina poliment.

    « Je suis au regret de vous interrompre, gentes Dames, mais j'aurais grand besoin de vous emprunter Dame Maelennig, si cela ne vous est pas trop déplaisant. Je vous promet de vous la rendre sous peu. » Il s'autorisa une courte pause et se tourna vers la jeune femme avec un sourire presque amusé. « S'il vous agrée, bien évidemment, Dame, de me donner ma place dans cette valse effrénée que vous subissez depuis votre arrivée parmi nous. »

    Espérant que sa touche d'humour lui plaise, il lui tendit le bras, prêt à l'escorter vers un balcon un peu tranquille qu'il avait repéré plus tôt. Plus que danser, c'était lui parler qu'il voulait. S'assurer qu'elle allait bien, même si la voir en bonne santé avait calmé la plupart de ses craintes, discuter avec elle des récents événements, et surtout, surtout, s'assurer qu'elle était toujours son alliée dans la curieuse cour qu'il avait commencé quelques mois auparavant auprès d'elle
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Maelennig HeyerdhalMaelennig Heyerdhal

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Le poids des lignées passées et à venir


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MessageSujet: Re: Après la panse vient la danse [Mael]   Après la panse vient la danse [Mael] EmptyVen 10 Avr 2015 - 3:08

Mannheim, sa beauté, sa noblesse. Sa foule compacte, ses douceurs, ses couleurs éclatantes qui certes ne valaient pas celles de Valkoinen, mais lui donnaient un charme bien à elle. Ses hordes de nobles en quête d’un bon parti pour eux, pour leur fils, leur neveu, leur petit-fils même parfois. Et hormis ses royales nièces, particulièrement les aînées dont on fêtait présentement l’anniversaire, il y avait peu de meilleurs partis en Midgard que Nera et Maelennig Heyerdhal.

Même si le seigneur était seul apte à prendre la décision finale, leur rang comme leur éducation leur octroyaient le luxe d’avoir leur mot à dire dans l’affaire : quand on épousait une Heyerdhal, on n’épousait pas le père de la demoiselle avec une poule pondeuse en guise de cadeau. On épousait une femme qui entendait bien être l’égale de son époux et toute une famille dont la fidélité n’avait d’égale que les exigences.

Il fallut donc se plier au jeu des convenances, sourire, éconduire poliment les plus insignifiants et les plus insatisfaisants, faire semblant d’écouter les autres, en écouter réellement certains et les rediriger vers le seigneur son frère pour discuter plus avant. Après quoi il fallait trouver quelques instants pour indiquer à Soedal que celui-ci, à moins qu’il apporte des avantages mirifiques pour les Heyerdhal, elle était contre, que celui-là, pourquoi pas, à voir en fonction des autres demandes, qu’un troisième lui avait fait la cour à elle mais n’avait cessé de regarder Nera à la dérobée.

Puis écouter le discours du roi, s’interdire tout commentaire à son propos, fût-il mental, partager une danse avec son neveu Cid, lui aussi harcelé mais de demoiselles froufroutantes et même de politiciennes : celle qui la remplaça pour la danse suivante était une elfe qui lui parut immense, plus grande que son neveu même, ambassadrice lui semblait-t-il. Maelennig leva dignement le nez et dansa avec l’un des conseillers de son royal beau-frère.

Retourner dans le bain des prétendants, les perdre un instant dans la foule autour du feu de Skuld, grappiller quelques instants de paix le temps d’écrire son nom et de le déposer dans les flammes, accompagnée de Nera, des filles de Cordelia et de certaines de ses dames de compagnie. Maelennig ne craignait pas le sort. Après tout elle avait porté de l’ambre et de l’or toute sa vie en hommage à Freyja et n’avait jamais souffert des maux terribles qui guettent les enfants et les jeunes filles : la déesse aux chats ne la considérait-elle pas avec bienveillance ?


Lorsque la nuit fut suffisamment avancée pour prétexter la fatigue et jouir d’un peu de quiétude, elle discuta encore un long moment avec Nera, commentant et jugeant leurs prétendants respectifs, riant des défauts qu’elles n’avaient pu critiquer au grand jour. La discussion dévia inévitablement sur les absents de ce premier jour de parade prénuptiale, et plus précisément sur le grand absent qu’était le seigneur Jörden. Nera était d’avis qu’il avait compris que le refus de sa grand-mère était irrévocable, mais Maelennig savait que l’arrivée au pouvoir de Soedal avait changé la donne. La sœur du nouveau seigneur Heyerdhal était désormais officiellement à marier, et la dame Solveig n’avait plus qu’un rôle consultatif dans le choix de l’époux de sa fille. Oh bien sûr, sa voix s’élevait encore souvent dans les conseils de son fils, et elle portait loin, mais ceux dont les propositions officieuses avaient été refusées pouvaient désormais retenter leur chance officiellement – et risquer d’être définitivement éconduits. Il n’y aurait pas de troisième chance. Sans doute le seigneur Jörden attendait-il la bonne occasion.

Nera s’étonna de l’absence de commentaire de sa tante à propos du doyen de ses prétendants sérieux. Il était vieux, avait enterré tous ses proches, vivait au bout du monde dans un tombeau de glace et de vent, et s’il n’y avait que cela ! Comment un homme si inexpressif pouvait-il constituer un bon parti ? Comment savoir ce qu’il pensait ? Comment espérer construire quelque chose avec quelqu’un qui s’est si bien caché derrière un masque de neutralité ? Y avait-il seulement quelque chose derrière ce regard froid et analytique ?

La jeune fille avait du mal à comprendre que Maelennig s’attache aussi peu à la question des relations affectives avec ses prétendants. Pour l’aînée, l’important était d’abord d’être traitée comme une égale par son futur époux, ensuite d’être sur la même longueur d’onde, d’avoir les mêmes objectifs – la grandeur du royaume et du lignage – et de se donner les moyens de les atteindre. Ses parents ne s’étaient pas mariés par amour ; l’amour était venu après, s’il était seulement venu. Nera était peut-être un peu jeune pour l’accepter. Peut-être sa mère à elle avait-elle été trop permissive – rien d’étonnant vu la transparence du personnage, estima-t-elle avec un rien de mépris –, peut-être simplement avait-elle aimé son promis avant même de l’épouser et n’avait pas informé sa fille qu’une telle situation était l’exception. Ou peut-être le cœur de la jeune fille battait-il déjà pour quelqu’un. Il faudrait tâcher d’en apprendre davantage. Sa nièce méritait mieux que de s’amouracher d’un inaccessible.


A la différence du reste de sa famille, Maelennig se leva avec le soleil et se vêtit sobrement pour une escapade en ville. Entourée de sa petite cour de femmes et de quelques chevaliers, elle voulait profiter du calme matinal pour fouiller les cendres du feu de Skuld. Il lui fallut insister pour le faire elle-même : elle ne voulait pas offenser les dieux en se déchargeant de la tâche sur quelqu’un d’autre. Comme il ne fallait pas non plus que la belle-sœur du roi fouille à quatre pattes dans la cendre parmi le peuple et devant les fêtards attardés, elle dut utiliser de longues pinces de bois pour retourner les galets visibles, fouiller la cendre et chercher à déchiffrer ceux qui avaient éclaté. Une de ses dames de compagnie qui cherchait son propre galet finit par retrouver celui de sa maîtresse, et Maelennig sourit de le découvrir intact avant de le ranger dans l’aumônière à sa ceinture. Après encore un moment à chercher, chacune avait retrouvé son galet, et hormis pour de petits éclats sur trois d’entre eux aucun n’avait éclaté.

La jeune femme rentra joyeusement avec son escorte en discutant de ce que les petits éclats pouvaient bien signifier – de petites contrariétés assurément –, acheta des douceurs à un étal un peu plus matinal que les autres, et croisa ses nièces et certains de ses jeunes neveux sur le chemin de ses appartements. Les jeunes femmes discutèrent quelques instants des présages et du tournoi à venir, puis la demoiselle passa une tenue plus éclatante pour assister audit tournoi. Une longue robe aux couleurs des Heyerdhal, gris-bleu et bleu-gris, rehaussée de broderies sombres, pour encourager les chevaliers qui défendraient leur honneur. Les teintes ternes ne lui allaient pas très bien, lui donnaient un air presque maladif ; mais nul n’aurait osé critiquer les couleurs des Heyerdhal portées par Maelennig. A son cou, le collier d’ambre et d’or offert par Soedal détonait violemment parmi les couleurs froides. Elle l’ôta à regret pour des bijoux d’argent et d’or blanc aux ciselures complexes. Sa coiffure relevée et le maquillage sobre autour de ses yeux lui conféraient un air solennel, austère, sévère presque. Il fallait faire honneur à ceux et celles qui allaient se battre pour sa maison. Le tournoi n’était pour certains qu’un moyen d’être remarqué, pour d’autres une occasion de lever haut ses couleurs ou celles de ses seigneurs. La moindre des choses était de leur montrer qu’ils ne risquaient pas leur vie pour rien. Même dans un tournoi au premier sang, même en présence de mages guérisseurs, les accidents restaient possibles.

Entourée de toute sa famille, la jeune femme s’autorisa un léger haussement de sourcils à l’annonce du premier combat. Adrena l’Ulaun, rien de moins. Le seigneur l’Ulaun laissait sa fille aînée, chevalier de la garde, entrer en lice. Inhabituel, mais pour ce qu’elle en savait le seigneur l’Ulaun laissait bien sa fille aînée, chevalier de la garde, errer aux quatre coins d’Yggdrasil, alors un tournoi, pourquoi pas. Elle avait la carrure et la force d’un chevalier, l’agilité d’une femme, aussi longtemps qu’elle portait haut les couleurs de sa famille et n’allait pas contre la volonté des siens et de son roi, personne n’avait rien à en dire. Le problème pouvait en revanche venir de la difficulté de concilier une vie de chevalier de la garde et le rôle d’épouse et de mère qui lui incomberait inévitablement. Maelennig ne concevait pas qu’une fille aînée de seigneur puisse ne pas être tôt ou tard mariée à un homme de son rang. Si on lui avait demandé une opinion franche, elle aurait répondu qu’une femme chevalier Heyerdhal pouvait se permettre de ne jamais prendre époux, mais pas la fille d’un grand seigneur de Midgard, que le célibat était tout simplement incompatible avec un rang aussi élevé. Elle aurait répondu que le père de la demoiselle n’aurait jamais, au grand jamais, dû épouser sa mère d’extraction si humble. Mais les valeurs des l’Ulaun n’étaient pas celles des Heyerdhal, ils n’accordaient pas tant d’importance au lignage et au sang que les autres familles.

La jeune femme secoua légèrement la tête en réalisant que l’idée d’une opinion franche lui évoquait le seigneur Jörden. Plus d’une fois ils avaient échangé de telles opinions, presqu’inconnus qu’ils étaient alors – et qu’ils étaient toujours, au fond, comme il en était avec tous les prétendants et comme il en serait les premiers temps avec son époux.

Quant au partenaire de la demoiselle l’Ulaun…un mage. Un grand platine aux vêtements rapiécés, visiblement à peine plus âgé qu’elle ou peut-être même moins. La jeune femme l’étudia avec intérêt. Les mages ne faisaient que rarement la démonstration de leurs pouvoirs. Cela leur était interdit par leur ordre apparemment, ou tout comme. Pourquoi celui-ci s’était-il inscrit au tournoi ? Pour l’argent ? L’explication semblait logique au vu de son accoutrement, mais lui était avis qu’il aurait gagné bien davantage à se faire embaucher parmi les guérisseurs. Plus intéressant, puisqu’il était arrivé avec la demoiselle l’Ulaun, ils se connaissaient. Maelennig s’efforça de déchiffrer leurs regards, leurs attitudes. Ce qu’elle distingua, pas tant dans leur maintien et leurs gestes que dans leurs regards et leurs mimiques, figea les traits de son visage dans un masque presque dédaigneux. Quelle idée de s’afficher ainsi quand on était fille aînée de seigneur. Encore une fois les relations amoureuses étaient, dans l’esprit de la jeune femme, réservées au peuple, certainement pas aux seigneurs et à leurs enfants. Demandait-elle une union d’amour, elle ? Avait-elle laissé le moindre espoir aux jeunes gens qui la complimentaient et la buvaient des yeux, même lorsqu’ils ne la laissaient pas indifférente ? Elle cherchait l’intérêt des Heyerdhal, le sien propre aussi un peu, mais les sentiments n’avaient pas à entrer en ligne de compte, du moins pas tant qu’il ne s’agissait pas d’une répulsion absolue. Il fallait tout de même un minimum d’entente au sein du couple pour prendre des décisions en commun et faire fructifier la famille.

On leur remit de vieilles armes, usées, ébréchées, sans doute pour éviter les accidents, portant des blasons anonymes. Sans être experte au maniement de l’épée Maelennig connaissait au moins les postures de bases, bien assez pour voir que ce n’était clairement pas le cas du mage. S’il n’avait jamais appris qu’à maîtriser ses pouvoirs et les arcanes du savoir, c’était somme toute bien normal. Elle ne l’en blâmait pas, au contraire : la culture était aussi digne d’apprentissage que les armes, sinon plus. Mais dans ce cas, qu’il fasse ce qu’il savait faire et faisait sûrement très bien, et qu’il laisse le combat aux combattants. La jeune femme était agacée à présent. Il y avait ceux qui disaient que la Fortune souriait aux audacieux, et ceux qui disaient que chacun devait rester à sa place. Elle penchait clairement vers la seconde opinion, d’autant que la Fortune avait déjà bien assez souri à ce jeune homme en lui octroyant ses pouvoirs de mage.

Le combat fut bref, la maîtrise des éléments du mage impressionnante – au point de faire vaciller toute l’assemblée lorsqu’il fit trembler la terre –, tout comme l’agilité et la vélocité de la fille aînée du seigneur l’Ulaun, qui en fin de compte gagna par forfait. La belle-sœur du roi applaudit poliment avec les autres, le visage fermé. Soudain la voix d’un vieillard s’éleva dans les airs, parlant de ténèbres et de terreur, et surtout provoquant une panique inexplicable. Maelennig aurait écouté l’homme d’une oreille et l’aurait fait emmener pour lui permettre de dessaouler tranquillement, mais visiblement la fureur prophétique du vieil homme avait frappé son beau-frère au moins autant que la foule, quoique d’une façon différente, puisqu’il se retira avec femme et enfants. Peut-être s’agissait-il aussi de leur éviter la bousculade. Les Heyerdhal et les autres familles nobles avaient la chance d’être protégés par leurs chevaliers, mais la jeune femme savait que ce ne serait pas le cas de tout le monde. Elle baissa la tête et laissa les hommes de son frère les ramener indemnes au palais.


Les discussions allèrent bon train durant le reste de la journée. Certaines parlaient d’un envoyé des Ases, d’autres disaient que seul Odin lui-même avait pu provoquer une frayeur pareille à une foule si nombreuse et si disposée à l’amusement, d’autres encore affirmaient qu’il ne s’agissait que d’un vieux fou, certaines ne savaient que penser et les autres s’en moquaient complètement. Maelennig était de ceux qui ne savaient que penser. Elle aurait bien penché pour le vieux fou, mais un vulgaire dérangé n’aurait jamais provoqué une telle panique.

La jeune femme fit semblant d’oublier que des innocents avaient été piétinés par leurs semblables en se faisant préparer pour le bal du soir, qui n’avait pas été annulé. La robe était composée de plusieurs épaisseurs d’un bleu très sombre semé d’argent et de diamants, ses amples manches doublées d’un gris-bleu plus clair, comme le ciel de ses montagnes chéries, parsemé de ses étoiles innombrables et magnifié par la présence alternée de Nyx et de Styria. Diamants à ses cheveux, diamants à son cou, diamants à ses doigts, seul un fin ruban noir à son poignet rappelait que certains ne sentiraient plus jamais le vent du soir sur leur visage. La soirée était à l’amusement, mais des innocents étaient morts d’avoir voulu profiter des divertissements offerts par la couronne et malgré tous ses efforts elle ne pouvait l’oublier. Maelennig se sentait presque coupable d’avoir eu des chevaliers pour la protéger. Que devaient penser Hannah et Faëris en l’honneur de qui le tournoi avait été donné… leur seizième anniversaire resterait dans les mémoires pour l’intervention d’un vieillard et pour le sang qu’elle avait fait couler. Maelennig n’avait pas vu ses discrètes nièces depuis l’incident mais espérait pouvoir leur parler un peu le soir venu. En faisant comme si tout allait bien. Alors que rien n’allait bien.

Vint le soir, le repas somptueux offert par le roi son beau-frère, qui ne pipa mot de l’incident – et dévoila ainsi bien des informations : le roi avait ses défauts, mais l’étourderie, l’indifférence ou la goujaterie n’en faisaient pas partie. Mentionner les anonymes piétinés par la foule aurait certainement suscité des questions, des interrogations auxquelles il n’aurait pu ou voulu répondre. Maelennig en conclut qu’il ne s’agissait pas d’un simple vieillard éméché, et en perdit tout appétit. Elle fit néanmoins honneur au banquet, car il fallait faire comme si tout allait bien, à l’image de ses congénères de la haute société.

Après quelques danses, un jeune homme de bonne famille vint lui glisser quelques mots aimables et une branche de cerisier en fleur ; une aberration compte tenu de la saison mais, lui apprit-il, les cerisiers de ses terres donnaient des fleurs tardives aux fruits incomparables. Il avait pris la liberté de lui en amener un jeune spécimen vigoureux qui, si elle daignait l’accepter, donnerait des fruits l’année suivante. Elle apprécia la métaphore et la figure avenante et remercia le jeune homme en souriant. Il avait le mérite de n’être ni insistant ni insolent ni même de sérieusement penser avoir une chance, sans doute avait-il simplement saisi une occasion de se faire connaître des Heyerdhal. La jeune femme attendit quelques instants après le départ du prétendant, puis confia la branche et ses belles fleurs à l’une de ses dames de compagnie au regard teinté d’envie. Admirait-elle les fleurs ou regrettait-elle le jeune homme ? Maelennig se promit d’aborder le sujet du cerisier dès le lendemain. Il était d’un rang trop inférieur au sien, mais une dame de compagnie de la belle-sœur du roi, probablement future Dame de surcroît, restait un parti très honnête, donc pourquoi ne pas l’envisager.

Si on avait fait remarquer à Maelennig que sa récente obsession sur le mariage confinait à la monomanie, elle aurait répondu que c’était à cause des prétendants qui l’assaillaient, et n’aurait pas totalement menti. Elle vivait mariage, pensait mariage, dormait mariage, et la politesse constante face à chaque prétendant commençait à lui peser. Elle tourna donc élégamment le dos à ceux qui auraient pu tenter de l’aborder et entama une discussion d’apparence très sérieuse avec certaines de ses nièces. Hannah et Faëris s’étaient visiblement éclipsées peu après le repas, elle n’avait aperçu leur chevelure rougeâtre nulle part et c’était bien dommage, mais restaient les autres et leurs amies respectives.

Visiblement tout le monde n’avait pas compris sa volonté de quiétude, et une silhouette longiligne s’approcha de leur petit groupe. La jeune femme feignit de l’ignorer mais un moment arriva où elle ne put que reconnaître le seigneur Jörden, qui avait jusque-là brillé par sa discrétion. Elle se demanda fugacement s’il s’était enfermé dans la bibliothèque royale comme il s’était enfermé dans celle des Heyerdhal quelques mois plus tôt, puis se rappela avoir entraperçu sa silhouette à plusieurs occasions. Il avait simplement attendu une pause dans le tourbillon des prétendants, un moment d’attention qu’elle pourrait lui consacrer, à lui et seulement à lui. Elle consentit donc à se laisser "emprunter" comme il le formula élégamment, et le signala d’un hochement de tête à son cercle qui se déplaça de quelques pas avant de se reformer sans elle. Aucun prétendant n’oserait de toute manière interrompre le seigneur Jörden, qui restait l’un des hommes les plus puissants de Midgard quoi qu’on veuille en dire.

« Seigneur Jörden. » Elle s’inclina comme l’exigeait le protocole, avec un léger sourire. « Comment vous portez-vous ? Il m’agrée bien entendu, votre place dans la valse vous était toute réservée… »

"Était". Une demoiselle comme il faut ne disait pas "j’ai failli attendre" mais elle pouvait se permettre de le penser. Le temps passant Maelennig avait en effet fini par se demander si Nera n’avait pas raison ou s’il n’avait pas fini par trouver un meilleur parti. C’est donc avec un certain soulagement – étrange au demeurant puisqu’elle et son frère avaient déjà reçu quelques propositions particulièrement dignes d’attention et auraient donc objectivement pu se passer du retour du seigneur Jörden – qu’elle posa délicatement sa petite main sur le bras du grand homme et se laissa guider vers un balcon. Pas de valse au programme visiblement, Jörkiel Jörden avait horreur de perdre du temps et ne s’en était jamais caché. C’était aussi bien, cela lui évitait de chercher que dire pour lancer la conversation.

« …j’ai craint un instant que le précédent refus de ma mère vous eût définitivement dissuadé d’y participer. » avoua-t-elle après quelques pas vers l’air frais de la nuit. « Mais vous n’êtes pas homme à abandonner, n’est-ce pas. »

Ce n’était pas vraiment une question, pas vraiment une nouveauté non plus, mais elle tenait étrangement à souligner ce point. Comme si d’avoir retenu sa langue et ses pensées face à tant de prétendants lui avait donné une irrépressible envie de franchise. Ils avaient déjà eu plusieurs échanges de la sorte, francs et sans fioritures, mais après un accord explicite ; elle espéra soudain que sa franchise spontanée ne serait ni mal vue ni mal interprétée. Elle se reprit, regarda à l’extérieur. Le ciel était piqueté d’étoiles et Styria brillait de tous ses feux, illuminant les diamants de sa robe comme autant d’astres terrestres.

« Mais je parle, et je vous empêche de parler. » sourit-elle. « Je vous en prie, dites-moi tout. »
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Jörkiel JördenJörkiel Jörden

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MessageSujet: Re: Après la panse vient la danse [Mael]   Après la panse vient la danse [Mael] EmptyLun 15 Juin 2015 - 15:19

Les lumières de la fête faisaient derrière eux un halo doré qui se perdait dans la nuit, leur donnant juste assez de lumière pour ne pas être dans la pénombre sans se laisser aveugler. L’air extérieur, après l’étouffement de la salle était également un soulagement pour le Seigneur du Nord qui, s’il n’avait rien contre les festivités, regrettait assez souvent la fraîcheur de ses montagnes natales. Les yeux perdus devant lui, il écoutait, réfléchissait. La nuance utilisée par la jeune femme ne lui avait pas échappée. Certes, il s’était fait attendre mais en voulant lui signaler qu’elle n’était pas à son service, elle envoyait un tout autre message. Elle s’était inquiétée, quelque part, de savoir s’il viendrait ou pas. En se faisant désirer, il se faisait désirable. Il en conclu donc qu’il avait bien fait, que son timing était bon et que tout allait bien se passer.

C’est donc en silence qu’il la laissa continuer, hochant poliment la tête pour signifier qu’il écoutait tandis qu’elle parlait de ses craintes de rétractation et de sa confiance en son obstination. Là encore, il y voyait de bons signes pour la poursuite de ses plans. Il lui fit cadeau d’un de ses sourires triste. En effet, il n’était pas homme à abandonner. Il n’était non plus pas homme à se lancer à corps perdu dans un combat perdu d’avance. Par chance, il lui semblait que tel n’était pas le cas. Il continua à ne rien dire, fixant les étoiles, espérant qu’elle se dévoilerait un peu plus encore. Malheureusement, la jeune femme semblait s’être reprise et tentait à son tour d’en savoir un peu plus. Il réfléchit un moment, laissant les questions non posées remplir le léger silence. Puis, avant qu’elle ne puisse vraiment prendre la mouche, il se lança à son tour.


« Je pourrais m’excuser, Dame, d’avoir autant délayé à venir vous rendre visite mais ce serait hypocrite et je crois que nous avions opté pour une relation basée sur la franchise. En réalité, préférant parler que danser, j’avais décidé de laisser mes concurrents épuiser pour moi les plaisirs de la fête et de la musique avant de vous offrir quelque chose qui me ressemblerait plus, le calme et le silence nocturne. »

Que cela lui ait permis de compter et de jauger la compétition était un autre point qu’il ne préférait pas adopter à voix haute. L’honnêteté avait ses limites. Il y avait d’autres choses, cependant, qu’il pouvait dire franchement sans pour autant se l’aliéner.


« Je vous savais assez intelligente pour comprendre que mes intentions à votre égard n’avaient pas changé. Simplement, je trouve que l’anniversaire d’autrui n’est pas forcément le bon moment pour se lancer dans une cours effrénée, surtout avec la tragédie que nous venons de vivre. Cela m’aurait paru déplacé de paraitre trop impatient. Et si vous me permettez d’aller jusqu’au bout de ma pensée, je ne pense pas qu’attendre encore un peu avant de me renouveler ma demande ne change grand-chose. J’ai confiance en votre fortitude. »

C’était répondu. En beaucoup de mots et en peu d’idée finalement et cela n’avait pas d’importance. Il prit un moment pour regarder le ciel à nouveau, pensant à ses terres qui se géraient sans lui, alors qu’il était là à faire le pantin dans un évènement certes important mais sans réelle signification.


« Cela posé, reprenons depuis le début. Comment vous portez vous Dame Maelennig ? Passez vous de bons moments en cette compagnie ? »
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